Dix jours après le putsch mené par le lieutenant-colonel Doumbouya en Guinée

Article : Dix jours après le putsch mené par le lieutenant-colonel Doumbouya en Guinée
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15 septembre 2021

Dix jours après le putsch mené par le lieutenant-colonel Doumbouya en Guinée

Cela fait juste dix jours depuis que le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya a pris le pouvoir par un putsch en Guinée. Il a justifié la prise du pouvoir par les mêmes raisons que le peuple réclamait en majorité.

Le dimanche 5 septembre m’a trouvé hors de la capitale, car j’étais l’envoyé spécial de Guinéematin.com à Boké. Ce, pour couvrir des manifestations des femmes qui réclamaient un service de base, « le courant » à la sous-préfecture de Kamsar depuis le 2 septembre. Une ville minière d’où sortent beaucoup de tonnes de bauxite par son port. J’étais par ailleurs parti pour des sujets concernant le voyage que j’ai commencé à l’intérieur du pays dans ce blog.

Dix jours d’actualités

Ce dimanche, dès 10 heures, j’ai quitté Kamsar pour la préfecture de Boké afin d’être mieux situé sur l’actualité. A mon arrivée aux bandes de 12 heures c’est le chaos, les uns disent que Alpha Condé est arrêté d’autres se méfient encore. Mais dès le soir c’est l’euphorie totale tout le monde sait désormais que l’armée a pris le pouvoir. Le lundi, le gouverneur et le préfet passent les clés de la région et préfecture à l’armée conformément au communiqué lit le soir à la télévision nationale.  Ce qui a été suivi par une liesse totale à la ville pour accompagner le gouverneur au camp Kwame Kuruma de Boké.

Les jours qui suivent, les médias nationaux et internationaux en ont fait un écho. Sur les réseaux sociaux les internautes guinéens s’en prenaient aux journalistes du pays qui n’ont pas pu édifier la population sur ce qui se passait dans le pays. D’autres même abordaient avec une boutade sur les titres des journaux : « Ça tire à Kaloum ».

Des champions en talk-show (le mal des médias), prétendent parler au nom de tout le peuple. Il faut, je cite « bannir les cadres du RPG ». Il faut « annihiler toute la classe politique ancienne » etc. Ce qui a marqué du plus ce putsch est du fait que tout le monde est unanime sur l’échec d’Alpha Condé. En guise d’exemple Serge Daniel, journaliste et ancien correspondant de RFI en Guinée qui a côtoyé le président déchu, dresse un bilan mitigé à son égard : « Alpha Condé disait qu’il va être le Mandela et le Obama de la Guinée en même temps. Il n’a été ni l’un ni l’autre, il est resté lui-même. »

Septembre le mois des grands événements en Guinée

28 septembre 1958, le peuple de Guinée vote NON contre l’idée de la communauté avec la France piloté par le général De Gaulle lors d’un référendum. Cette date a changé le destin du petit pays d’une superficie de 245857 km2. Les difficultés ont été majeures par la suite, difficultés économiques, ingérences étrangères mais aussi et surtout des faux complots qui ont mis en exile et à exterminer toute une minorité (les peuls). Résultat le père de l’indépendance Ahmed Sékou Touré est étiqueté en deux casquettes. Je cite Alain Foka: « Héros pour les uns et tyran sanguinaire pour les autres ». Tout de même, il avait fini par rester jusqu’à son dernier souffle le 26 mars 1984. Trente-sept ans après sa mort, les victimes du Camp Boiro attendent toujours que justice soit faite.

Le lundi 28 septembre 2009, les forces vives de la nation guinéenne partent en meeting au stade du même nom aujourd’hui, pour protester contre une éventuelle candidature du chef de la junte d’alors, Moussa Dadis Camara. Résultat, 157 personnes tombèrent sous les balles de l’armée, 1500 furent blessées, 89 portées disparues et 109 femmes furent violées, selon la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH). Douze ans après, les victimes attendent encore que justice soit faite. A ces dates, s’ajoute celle du putsch de 05 septembre que beaucoup de guinéen considère comme une libération et non une entrave à la démocratie.

Une ère d’Alpha catastrophique

Venu en 2010, Alpha Condé est le premier président démocratiquement élu en Guinée. Venu en 2010, il était le plus ancien et le plus crédible de par sa ferme opposition aux deux régimes qui l’ont précédé. Il avait suscité autant d’espoirs mais les premières contestations ont commencé juste quelques années après sa prise de pouvoir. Celui qui était jadis démocrate ambitieux refuse toute élection législative ou communale, il a fallu la rue et des morts pour qu’il abdique et organise les élections législatives en 2013. Une justice qui n’a jamais su rester aux attentes de la population, aucune enquête concernant les morts lors des manifestations ou des anciens évènements avant son régime.

Nonobstant toutes ses réalités il s’engage pour un troisième mandat, combattu jusqu’au bout mais il a tenu. Alpha Conde l’a dit : « Dans les autres pays où il y a des nouvelles constitutions, il y a eu beaucoup de manifestations, il y a eu des morts, mais ils l’ont fait ». C’était lors d’un entretien qu’il a accordé au journal Le Monde. En Guinée y a eu des morts mais il l’a fait aussi.

Difficile pour moi de parler d’économie vu que je m’y connais pas mais aussi pour ne pas que les communicants me tirent des flèches sur les croissances que la Guinée a enregistré aux temps de Condé. Ce qui ne se comprenait pas quand on connait la pauvreté que vivaient les guinéens.

Diarouga Aziz Balde

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